Leucoaraiose : symptômes, réversible, comment la soigner ?

Leucoaraiose : symptômes, réversible, comment la soigner ?

La leucoaraiose (ou leucoaraïose) témoigne d'une atteinte de la substance blanche cérébrale d'origine vasculaire (atteinte des petits vaisseaux). Elle s'observe chez les patients âgés. Explications avec le Pr Didier Dormont, neuroradiologue.

Définition : Qu'est-ce qu'une leucoaraiose ?

Le terme leucoaraiose a été inventé en 1986 par Hachinski, Potter et Merskey pour décrire une raréfaction ("araiosis") de la substance blanche cérébrale. "L'invention de ce terme correspond aux progrès de l'imagerie cérébrale (scanner et surtout IRM) permettant de visualiser ces anomalies de la substance blanche du sujet âgé qui étaient jusque-là indétectables en pré mortem et même peu évidentes sauf dans des cas très évolués sur les autopsies ", explique le Pr Didier Dormont, neuroradiologue. La leucoaraiose (ou leucoaraïose) n'est pas une maladie mais un signe, visible en Imagerie cérébrale surtout en IRM témoignant d'une atteinte de la substance blanche cérébrale d'origine vasculaire (atteinte des petits vaisseaux). Elle s'observe chez les patients âgés. "Sa fréquence est néanmoins très variable d'un sujet à l'autre et l'on peut observer des sujets très âgés qui ne présentent aucune leucoaraïose et des sujets relativement "jeunes" (entre soixante et soixante-dix ans) qui présentent une leucoaraïose très évoluée ", poursuit le spécialiste. Des facteurs génétiques interviennent très probablement. "Une leucoaraïose apparaît au scanner cérébral sous la forme d'hypodensités (zones plus noires que la substance blanche normale) mais est nettement mieux visible en IRM ou elle apparaît comme des zones d'hypersignal en séquence pondérée en T2. Une leucoaraïose très étendue ou s'associant à d'autres anomalies cérébrales d'origine vasculaire (en particulier un accident vasculaire cérébral) peut aboutir à une démence vasculaire ". La démence vasculaire est la deuxième cause la plus fréquente des démences en Europe et en Amérique du Nord. Elle représente 50 % des démences au Japon et 20 % à 40 % en Europe pour seulement 15 % en Amérique Latine. 

Quels sont les symptômes ?

Une leucoaraïose peut parfaitement être asymptomatique surtout si elle est peu étendue. "Elle témoigne cependant d'une atteinte des petits vaisseaux cérébraux qui n'est pas de bon pronostic à long terme, reconnait le médecin. Une étude européenne prospective (l'étude LADIS) a en particulier montré qu'une leucoaraïose sévère entraînait un doublement du risque de décès ou de handicap à 3 ans. De plus une progression de la leucoaraïose est corrélée avec l'apparition d'une dépression ". Lorsqu'une leucoaraïose aboutit à une démence vasculaire le sujet présente une altération des facultés cognitives (perte de mémoire, difficultés à accomplir des tâches et des raisonnements complexes, troubles de la marche). Les démences vasculaires s'associent souvent à des troubles de l'humeur.  

Quelles sont les causes ?

Les causes précises de la leucoaraïose ne sont pas encore toutes connues. Il existe manifestement une composante génétique : la leucoaraïose est plus rarement observée chez des patients dont les parents sont décédés très âgés. "Par ailleurs la leucoaraïose est d'autant plus fréquente et étendue que les sujets présentent des facteurs de risque vasculaires, en particulier une hypertension artérielle, un diabète, des troubles lipidiques. Le tabagisme est également un facteur de risque très important ", complète notre interlocuteur. 

Est-ce réversible et peut-on en guérir ?

Le seul traitement de la leucoaraïose est la correction des facteurs de risque vasculaire. "Ce traitement est fondamental étant donné les risques d'évolution vers la démence ou le handicap : traitement efficace et contrôlé d'une hypertension artérielle, correction d'un diabète, de troubles lipidiques arrêt immédiat et définitif d'un tabagisme ". En cas d'évolution vers une démence vasculaire, le diagnostic ne doit pas être confondu avec une démence de type Alzheimer mais une démence vasculaire peut s'associer et aggraver des lésions de type Alzheimer. 

Quel spécialiste voir ?

La prise en charge thérapeutique d'une leucoaraïose doit être faite par un gériatre, un neurologue et/ou un cardiologue (correction d'une hypertension artérielle, corrections des facteurs de risque). 

Quel est le diagnostic ?

Le diagnostic de leucoaraïose est porté par un spécialiste en radiologie et imagerie Médicale, neuroradiologue qui pourra identifier et quantifier les lésions de leucoaraïose sur une IRM. "L'importance de la leucoaraïose et donc sa gravité doit être évaluée grâce à une échelle standardisée de type échelle de Fazekas. Le compte-rendu radiologique permettra également de décrire d'autres lésions cérébrales d'origine vasculaire comme des lacunes, des micro-saignements ou des séquelles d'accidents vasculaires cérébraux ", assure le Pr Dormont. Le diagnostic de démence vasculaire venant compliquer une leucoaraïose repose sur des tests cognitifs effectués par un neurologue et un neuropsychologue qui permettent d'évaluer la mémoire, le langage, la motricité ou encore l'attention.

Quelles sont les complications ?

Une leucoaraïose témoigne d'une maladie des petits vaisseaux cérébraux qui, si elle est étendue, et s'aggrave peut entraîner l'apparition d'une démence vasculaire. "Une atteinte des petits vaisseaux cérébraux peut entraîner d'autres types de lésions cérébrales aux conséquences potentiellement graves comme des lacunes (petits accidents ischémiques cérébraux) ou des micro-saignements, détaille le Professeur. Les accidents ischémiques cérébraux (par occlusion d'un "gros" vaisseau) sont des évènements particulièrement graves qui frappent beaucoup plus fréquemment (trois fois plus) les patients atteints de leucoaraïose que les sujets normaux ".   

Quels traitements pour la stabiliser ou la soigner ?

La prise en charge est d'abord médicamenteuse : traiter l'hypertension artérielle, corriger les autres facteurs de risque vasculaires (diabète, LDL-cholestérol, tabagisme, sédentarité). Un antidépresseur sera rajouté au moindre doute de dépression. Enfin, comme dans beaucoup de démences et selon l'évolution, il faudra une prise en charge par l'orthophoniste (surtout prévention des fausse-route lors de l'alimentation), le masseur-kinésithérapeute (prévention chutes), sans oublier l'ophtalmologiste (verres correcteurs adaptés minimisant le risque hallucinatoire).

Quelle prévention pour éviter les récidives ?

Pour le moment, aucun traitement n'a permis de corriger des lésions de leucoaraïose déjà existantes. "On peut juste espérer arrêter leur progression pour éviter une évolution vers une démence vasculaire. S'il existe une maladie d'Alzheimer associée le risque est également celui de l'apparition d'une démence mixte même si les lésions de type vasculaire ne s'aggravent pas ", conclut le neuroradiologue. 

Merci au Pr Didier Dormont, Directeur Médical du DMU DIAMENT, Service de Neuroradiologie, Hôpital Universitaire Pitié-Salpêtrière, et chercheur à l'Institut du Cerveau, Sorbonne Université, Équipe ARAMIS CNRS, INSERM, INRIA à l'Institut du Cerveau.